
On ne trouve guère de manuscrits originaux dans le fonds ancien de la bibliothèque universitaire. Rien à voir donc avec l'arrivée en France du manuscrit des 120 journées de Sodome à l'Institut des lettres et manuscrits, le 3 avril dernier !
On parle ici d'un exemplaire d'une édition originale, conservé à Rennes 2 sous la cote 10440, des Mémoires pour la vie de François Pétrarque, tirés de ses œuvres et des auteurs contemporains avec les notes ou dissertations et les pièces justificatives, T. I - III. Amsterdam [Avignon ?]: chez Arskée & Mercus, 1764-1767. Voir un autre exemplaire numérisé par Google.
Cette oeuvre est attribuée à Jacques François de Sade, abbé libertin et oncle paternel du célèbre Marquis. Cet abbé écrivain n'est pas sans lien avec la vie romanesque du Marquis, puisqu'il s'était vu confié un temps l'éducation de son neveu. Ceci se passait au château de Saumane, dans le midi de la France, où les parents avait jugé bon d'envoyer l'enfant entre sa quatrième et sa dixième année.
Dans les Mémoires pour la vie de Pétrarque, l'auteur nous présente l'oeuvre du poète italien et le rôle de Laure de Sade, sa muse. La famille Sade en effet s'enorgueillit de cette aïeule illustre. La généalogie se termine ainsi « De ce mariage est né Donatien-François de Sade, qui vient d’épouser le 17 mai 1763, mademoiselle Cordier de Montreuil » (Notes explicatives du vol. 1, p. 49) .
Est-ce au Marquis aussi que pense l'auteur lorsqu’il écrit à propos de Laure vieillie avant l'âge ? : « Je ne doute pas que les chagrins domestiques n’aient autant contribué que les couches à ce changement prématuré de Laure. Il est difficile que dans un si grand nombre d’enfans, il n’y en ait quelqu’un qui tourne mal & qui donne du chagrin à ses parens » (p. 41). En 1764 en effet, date de la présente édition, le Marquis de Sade a juste 24 ans mais il a déjà eu maille à partir avec la justice. En octobre 1763, à la suite de la plainte d'une prostituée pour mauvais traitements, il a été emprisonné à Vincennes durant 15 jours, sous le chef d'accusation de "débauches outrées" et blasphème. Même s'il a été libéré sous la pression de sa famille, ces quinze jours ne sont que le premier contact avec la prison où il passera près de trente ans de sa vie.